Sidney Gavignet, l’un des marins français les plus expérimentés sur les grandes courses internationales (Volvo Ocean Race, America’s Cup), a intégré l’équipe d’Oman Sail il y a deux ans. Il a pris la barre de tous les multicoques de ce team (maxi trimaran, Extreme 40), et est désormais skipper du MOD70 Musandam.

Baptiste Morel/Voile-Multicoques.com
Sidney a accepté de répondre aux questions de Voile-Multicoques concernant cette première saison en MOD70.
Un mot sur ces MOD70, quels sont ses points forts ? Pensez-vous que certains éléments pourraient être améliorés sur le trimaran ?
Les bateaux sont très bien nés, marins, agréables à naviguer avec des réglages fins, qui se sentent tout de suite à la barre. Ces trimarans sont fiables, nous pouvons enchaîner les navigations avec des équipes techniques réduites, ce qui prouve leur solidité.
La classe a un problème technique principal, ce sont les foils qui sont fragiles. Nous en avons fait l’expérience sur la Krys Ocean Race, avec une casse sans qu’il n’y ait eu de choc sur l’appendice.

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L’équipe a décroché sa première victoire sur une étape offshore (sur la 4ème étape de l’European Tour entre Cascais et Marseille), dans des conditions légères, quels ont été les points forts de l’équipage sur cette étape ?
Nous avons forcément eu un peu de réussite, mais nous avions une bonne vitesse dans ce petit temps, nous avons pu grappiller petit à petit en s’arrêtant moins que les autres bateaux dans les zones de pétole. Le fait qu’il y ait toujours plus de vent devant nous a aussi permis de creuser une belle avance jusqu’à l’arrivée.
Vous aviez également effectué un beau début de course sur la Krys Ocean Race avant la casse du foil, et ce malgré un équipage nettement moins expérimenté que sur les autres trimarans, avec notamment deux omanais sur les étapes offshore, quelle est la force de cet équipage ?
J’espère que cette faiblesse deviendra notre force. Nous sommes obligés du fait de ce manque d’expérience d’être très structurés à bord, avec une organisation quasi militaire, je pense que cette rigueur peut sur le long terme devenir une force.
La langue « officielle » sur le bateau est l’anglais, nous avons donc uniquement Brian Thompson qui parle sa langue naturelle ; ceci implique un lexique commun à tout l’équipage, ce qui renforce encore l’organisation nécessaire pour les manœuvres.
L’objectif d’Oman Sail est de former un équipage entièrement omanais, tu as à bord deux équipiers originaires du Sultanat sur les offshores et trois sur les inshores, comment jugez-vous la progression de ces marins ?
Leur progression est énorme, même si ce n’est jamais assez.
J’aime bien citer Fahad Al Hasni, qui est le plus jeunes des trois omanais qui naviguent à bord. Il a débuté la voile il y a seulement trois ans, en étant formé sur le Tour de France à la voile. Désormais c’est un très bon équipier, même si il n’est pas encore un bon pro, mais il le deviendra, d’abord au large, puis en peaufinant la technique sur les inshores également.
Nous sommes à Marseille, où je faisais sport-étude voile il y a 25 ans, c’est donc difficile de contracter une expérience de 25 ans comme la mienne en seulement trois ans.

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Il existe un programme de sélection de marins à Oman, mais comment se passe la sélection de vos équipiers sur le MOD ?
Oman Sail a de beaux résultats sur le tour de France à la voile, en Extreme 40 et nous avons nous aussi quelques bonnes performances en MOD70, mais chaque série travaille de son côté. Le vivier de marins existe, mais il est difficile de faire passer les gens d’une série à l’autre, et je suis presque en manque d’équipiers, c’est probablement la petite faiblesse du programme d’Oman Sail.
Oman Sail est donc très impliqué pour le développement de la voile dans le Sultanat, quel est l’impact de cet engagement au niveau local dans les écoles de voile ?
Ce programme a permis de construire deux écoles de voile dignes de celles que l’on peut trouver à Brest ou la Rochelle, les scolaires ont également accès à ces écoles de voile, un programme féminin se développe aussi, ce qui est important dans un pays musulman.
Le nombre d’enfants qui touchent à la voile depuis le lancement du programme est phénoménal.
Oman Sail est le seul équipage international de la série MOD70, que manque-t-il à cette classe pour attirer les marins étrangers ?
Effectivement il manque deux bateaux anglo-saxons sur cette classe, j’espère que nous les aurons bientôt .
Nous avons prouvé que les bateaux sont fiables, spectaculaires, que nous pouvons enchaîner les courses, le tour de l’Europe a été parfait et le tour du monde l’année prochaine le sera aussi, la classe a donc tout pour réussir, manque ces bateaux étrangers pour que le succès soit complet.
Aviez-vous des objectifs définis pour cette première saison en MOD70 ?
L’objectif sur la transatlantique New York Brest était de terminer la course, car nous avions débuté le navigations sur le trimaran seulement deux mois avant. L’objectif est donc rempli, malgré la casse du foil.
En ce qui concerne l’European Tour, nous visons le milieu de plateau, nous somme cinq, donc l’objectif est le podium, en gagnant des manches inshores et offshore. Actuellement nous avons atteint ces objectifs, mais la course est très serrée et nous pouvons finir 3ème comme 5ème.
Un mot sur les performances lors de la première journée des City Races de Marseille, dans le petite temps ?
L’équation était simple, deux mauvais départs, deux mauvaises manches, un bon départ une bonne place à l’arrivée, tout s’est joué sur ce point. Ceci fait parti de nos points à améliorer avec une marge de progression afin d’être plus constants dans ces phases de régates