Duel au sommet dans les deux classes multicoques.
En Ultime, Thomas Coville et Jean Luc Nélias sur Sodebo Ultim ont repris la tête hier au soir, grâce à leur placement plus à l’ouest, Sébastien Josse et Thomas Rouxel sur le Maxi Edmond de Rothschild ayant été contraint de tirer un bord de quelques heures pour se recadrer sur une route identique à celle de leur adversaire.
Le duo ouvrant sur le trimaran du Gitana Team a cependant nettement réduit son retard, passant de 60 à 25 milles ce soit, à la faveur d’une meilleure vitesse sur les dernières heures.
Les deux grands multis devraient être de nouveau ralentis dans les heures à venir, comme l’explique Antoine Koch, qui partage le routage météo du Maxi Edmond de Rothschild avec Jean Yves Bernot : « L’anticyclone était parfaitement positionné et nous avons eu un départ de course musclé mais assez classique. En revanche depuis plusieurs jours, nous observions une dépression en formation au large de la Mauritanie. Cette dernière se développe actuellement, c’est elle qui a créé une compression des isobares entre le continent africain et les Açores et qui a occasionné les vents forts et la mer chaotique subie par Gitana 17. Dans les prochaines heures, elle va générer des vents faibles dans le Sud du duo de tête et c’est pour éviter cette zone au maximum que le placement est très important et qu’il fallait à tout prix se redécaler dans l’Ouest pour éviter ses affres.»
La position du chasseur pourrait donc être intéressante pour éviter des zones de molles dans lesquelles pourraient tomber le leader.
Sébastien Josse, skipper du Maxi Edmond de Rothschild (Ultime) :
« Thomas et Jean-Luc ont joué un joli coup météo qui explique aujourd’hui qu’ils soient en tête de la course. Après le passage des Açores nous avions le choix entre empanner plusieurs fois ou passer sous J0 (grand gennaker). Compte tenu de notre position à ce moment-là, nous avons opté pour les empannages et une navigation sous J1 (génois) qui devait nous permettre de gagner en longitudinale. Sodebo a fait le choix inverse en se décalant dans l’Ouest pour glisser. Notre choix ne s’est pas avéré payant, loin de là. Non seulement l’état de mer dans la nuit de mardi à mercredi ne nous a pas permis d’exploiter comme prévu notre choix de voile et notre rencontre avec un grain sans vent a enfoncé le clou. Au final, c’est Thomas et Jean-Luc qui ont tiré le bon bord et aux vues des conditions météos qui se présentaient devant nos étraves nous avons dû hier soir empanner à 90 ° de la route pour nous éloigner des côtes africaines et des zones de molles annoncées dans notre sud. »À la sortie de ce recalage, l’addition s’est montrée salée : d’un crédit de 64 milles à 21h, Gitana 17 concédait 60 milles au lever du jour. « C’est toujours dur comme décision mais les fichiers du soir étaient très clairs. Il faut parfois savoir perdre un peu pour ne pas complètement hypothéquer la suite des évènements. »
Les affaires s’améliorent pour le 3ème engagé de la classe Ultime, Prince de Bretagne, Lionel Lemonchois et Bernard Stamm ont en effet pu passer une nouvelle drisse de grand voile. Le Multi de 80′ a donc retrouvé ses et file désormais à 27 noeuds vers le sud.
En Multi50, le duel se poursuit entre La Lou Roucayrol et Alex Pella sur Arkema et Erwan Le Roux et Vincent Riou sur FenêtréA-Mix Buffet. Arkema a repris l’avantage pour une petite dizaine de milles ce soir. Reauté Chocolat et Ciela Villages sont relégués à plus de 150 milles. La flotte navigue dans des conditions encore soutenues avec une mer qui reste dangereuse.
Ceci a d’ailleurs provoqué le chavirage du 50′ Drekan Groupe, avec une grosse frayeur pour les deux marins du bord.
En effet Christopher. Pratt était sur le pont lorsque le trimaran a chaviré, le marin a été éjecté du bateau, mais a fort heureusement pu rejoindre le multicoque retourné. Les deux marins ont pu être récupérés par un cargo et seront transférés sur un bâtiment de la marine portugaise demain. Le skipper et l’armateur tentent d’organiser la récupération du bateau.
Eric Defert, skipper du Multi50 Drekan Groupe (Multi50)
« On était sous un ris avec le petit gennaker au portant. On allait rouler le petit gennaker. J’étais dedans et Chris (Christopher Pratt) était sur le pont. Je me préparais à sortir, une risée est rentrée. Le bateau a sanci par l’avant. C’est monté fort, sous un nuage dans la nuit noire. On a navigué hyper prudemment au passage du front, et au grand large au niveau du cap Finisterre. Nous étions très prudent, on était pas en mode attaque comme des fous. Le but n’était pas de se mettre sur le toit. Chris a eu chaud. Moi, j’étais dedans, donc ça va, mais quand tu es sur le pont c’est moins facile. Il a y eu un gros moment de choc. Tu t’en veux, il n’y a pas de mots. Au-delà de perdre la course, on perd le bateau, on perd beaucoup de chose. Maintenant, il faut reconstruire.
Le patron de Drekan Groupe, qui est le co-propriétaire du bateau est en train d’organiser les choses avec les assureurs. Le problème, c’est qu’il n’y a pas d’émission depuis le bateau. Pour le retrouver, il faut calculer la dérive. Il y a quelque chose qui peut s’organiser peut-être au départ de Lisbonne.
Nos sauveteurs sont arrivés sur zone à minuit et demie. On les a vu à 1h30 car on voulait garder de la batterie. Ils ont tourné une heure, ils pensaient qu’on était tombé à l’eau. On a établi le contact à 1h30. Ils nous ont tournés autour toute la nuit, ils ont fait un super boulot. Pendant ce temps-là, on organisait les sacs avec Chris et on se reposait.
Le sauvetage fut épique car il y avait beaucoup de mer et du vent. Leur bateau n’avait qu’un petit moteur de 15ch. Ils sont venus à 3 nous sauver et parmi eux, il y avait un gars dont c’était l’anniversaire. Tu te rends compte, son cadeau ça a été de sauver deux vies…
Quand ça arrive, il n’y pas de seconde chance. J’ai senti partir le bateau, il a basculé par l’avant, il a tapé le mât, le mât n’a pas cassé. J’ai eu peur, j’ai appelé Chris et heureusement je l’ai entendu frapper sur le panneau.
Dans quelques heures, il va y avoir un check point et on va changer de navire. On a rendez-vous à une position GPS pour embarquer sur un navire militaire portugais. Nous n’avons quasiment rien pris juste nos passeports, quelques fringues. »
Erwan Le Roux, skipper de FenêtréA-Mix Buffet (Multi50)
« La descente est vertigineuse. Ca ressemble à une piste rouge noire, cabossée. Tu vas payer le remonte pente mais c’est balaise. On essaie de pas trop accélérer parce que l’état de la mer est vraiment dégueulasse. On pense au matériel. On a vu ce qui est arrivé à Drekan, ce qui nous a rassuré c’est qu’ils étaient tous les deux à bord. Physiquement, il faut faire hyper gaffe.
Y a toujours un gars dehors, on tourne toutes les deux heures. On essaie de faire avancer en ayant la main sur les écoutes. On va garder 25 nœuds jusqu’à ce soir. En première partie de nuit, ça devrait passer à moins de 20 nœuds. Y aune molle à passer, à contourner. Le match avec Arkema va être intéressant. On est plutôt content d’être Ouest. on verra par la suite si ça s’avère payant. On aura la réponse demain soir je pense.
Nous on est J1 et 2 ris dans la grand-voile. Ca avance pas mal comme ça.
Vincent m’a réveillé pour la vacation parce que c’est important. Quand on écoute Vincent parler de météo, c’est toujours avec bonheur et délice, ça se passe super bien de ce côté-là. Il a une bonne vision des nuages et de ce qui se passe autour.
Là, on est dans une petite molle, mais l’intérieur du bateau est pas si bruyant que ça.»